Anamorphose : Différence entre versions

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==Histoire du terme==
 
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Si l’on connaît surtout l’anamorphose – littéralement « forme qui revient », c’est-à-dire une déformation réversible (souvent, par la médiation d’un miroir) – sous sa forme classique, les activités ou même les logiques anamorphiques sont en vérité plus anciennes. Dès l’antiquité, on savait en effet que l’harmonie des ensembles architecturaux dépendait d’une déformation des lignes, naturellement rétablie par l’œil humain. Ces perspectives courbes, ou « dépravées » selon l’expression de Jurgis Baltrušaitis <ref>Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.5.</ref> qui leur a consacré de nombreux travaux, n’ont donné naissance au terme « anamorphose » qu’au XVIIe siècle. Elles qualifient alors plus précisément des images cachées dans d’autres images : Les ambassadeurs d’Holbein constitue un exemple canonique de ce genre. Ces anamorphoses classiques jouent donc d’un principe de révélation, en constituant une première entorse à la perspective linéaire héritée de la Renaissance, et son point de vue unique. À une époque plus contemporaine, Jurgis Baltrušaitis note cependant la présence de nouvelles anamorphoses, notamment remises au goût du jour par les surréalistes. L’anamorphose, dès lors, n’est plus cette construction géométrique s’appuyant sur les règles perspectives (dont elles contournent l’aspect prescriptif), mais bien la célébration d’une expérience déformante qui s’inscrit dans une poétique de l’informe, du désordre. Il s’opère ainsi un passage de la perspective anamorphique (où le point de vue détermine la révélation d’une image cachée) à un tracé anamorphique, qui s’intéresse à « la puissance déformatrice et non restauratrice des formes déformées <ref>Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.195</ref>». Si perspectives et tracés anamorphiques ont en commun une même esthétique de la distorsion, de l’aberration, celle-ci est radicalisée dans l’anamorphose contemporaine, caractérisée par une « puissance de démonstration de l’irréalité du réel et de la réalité de l’irréel <ref>Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.200</ref>».
 
Si l’on connaît surtout l’anamorphose – littéralement « forme qui revient », c’est-à-dire une déformation réversible (souvent, par la médiation d’un miroir) – sous sa forme classique, les activités ou même les logiques anamorphiques sont en vérité plus anciennes. Dès l’antiquité, on savait en effet que l’harmonie des ensembles architecturaux dépendait d’une déformation des lignes, naturellement rétablie par l’œil humain. Ces perspectives courbes, ou « dépravées » selon l’expression de Jurgis Baltrušaitis <ref>Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.5.</ref> qui leur a consacré de nombreux travaux, n’ont donné naissance au terme « anamorphose » qu’au XVIIe siècle. Elles qualifient alors plus précisément des images cachées dans d’autres images : Les ambassadeurs d’Holbein constitue un exemple canonique de ce genre. Ces anamorphoses classiques jouent donc d’un principe de révélation, en constituant une première entorse à la perspective linéaire héritée de la Renaissance, et son point de vue unique. À une époque plus contemporaine, Jurgis Baltrušaitis note cependant la présence de nouvelles anamorphoses, notamment remises au goût du jour par les surréalistes. L’anamorphose, dès lors, n’est plus cette construction géométrique s’appuyant sur les règles perspectives (dont elles contournent l’aspect prescriptif), mais bien la célébration d’une expérience déformante qui s’inscrit dans une poétique de l’informe, du désordre. Il s’opère ainsi un passage de la perspective anamorphique (où le point de vue détermine la révélation d’une image cachée) à un tracé anamorphique, qui s’intéresse à « la puissance déformatrice et non restauratrice des formes déformées <ref>Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.195</ref>». Si perspectives et tracés anamorphiques ont en commun une même esthétique de la distorsion, de l’aberration, celle-ci est radicalisée dans l’anamorphose contemporaine, caractérisée par une « puissance de démonstration de l’irréalité du réel et de la réalité de l’irréel <ref>Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.200</ref>».
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==Notes==

Version du 28 janvier 2016 à 13:22

L'anamorphose est un concept qui tente de saisir la superposition entre différents "plans" - ce qui relève traditionnellement du "réel" et de l'imaginaire.

Histoire du terme

Si l’on connaît surtout l’anamorphose – littéralement « forme qui revient », c’est-à-dire une déformation réversible (souvent, par la médiation d’un miroir) – sous sa forme classique, les activités ou même les logiques anamorphiques sont en vérité plus anciennes. Dès l’antiquité, on savait en effet que l’harmonie des ensembles architecturaux dépendait d’une déformation des lignes, naturellement rétablie par l’œil humain. Ces perspectives courbes, ou « dépravées » selon l’expression de Jurgis Baltrušaitis [1] qui leur a consacré de nombreux travaux, n’ont donné naissance au terme « anamorphose » qu’au XVIIe siècle. Elles qualifient alors plus précisément des images cachées dans d’autres images : Les ambassadeurs d’Holbein constitue un exemple canonique de ce genre. Ces anamorphoses classiques jouent donc d’un principe de révélation, en constituant une première entorse à la perspective linéaire héritée de la Renaissance, et son point de vue unique. À une époque plus contemporaine, Jurgis Baltrušaitis note cependant la présence de nouvelles anamorphoses, notamment remises au goût du jour par les surréalistes. L’anamorphose, dès lors, n’est plus cette construction géométrique s’appuyant sur les règles perspectives (dont elles contournent l’aspect prescriptif), mais bien la célébration d’une expérience déformante qui s’inscrit dans une poétique de l’informe, du désordre. Il s’opère ainsi un passage de la perspective anamorphique (où le point de vue détermine la révélation d’une image cachée) à un tracé anamorphique, qui s’intéresse à « la puissance déformatrice et non restauratrice des formes déformées [2]». Si perspectives et tracés anamorphiques ont en commun une même esthétique de la distorsion, de l’aberration, celle-ci est radicalisée dans l’anamorphose contemporaine, caractérisée par une « puissance de démonstration de l’irréalité du réel et de la réalité de l’irréel [3]».

Notes

  1. Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.5.
  2. Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.195
  3. Jurgis Baltrušaitis, Anamorphoses ou Thaumaturgus opticus, Les perspectives dépravées, Paris, Flammarion, 1984, coll. « Idées et recherches », p.200