Éditorialisation : Différence entre versions

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Version du 21 janvier 2016 à 09:00

Définition générale

L'Editorialisation désigne l'ensemble des dynamiques qui produisent et structurent l'espace numérique. Ces dynamiques sont les interactions des actions individuelles et collectives avec un environnement numérique particulier.

Autres définitions

On peut identifier trois différentes définitions de l'éditorialisation : une définition restreinte, une définition plus générale1, et une troisième définition qui tente de combiner les deux premières. Selon la définition restreinte, l'éditorialisation est l'ensemble des appareils techniques (le réseau, les serveurs, les plateformes, les CMS, les algorithmes des moteurs de recherche), des structures (l’hypertexte, le multimédia, les métadonnées) et des pratiques (l’annotation, les commentaires, les recommandations via les réseaux sociaux) qui permet de produire et d’organiser un contenu sur le web2. En d'autres termes, l’éditorialisation est donc une instance de mise en forme et de structuration d’un contenu dans un environnement numérique. On pourrait dire que, en ce sens, l'éditorialisation est ce que devient l'édition sous l'influence des technologies numériques. Évidemment, cela a aussi un impact sur les contenus eux-mêmes : le concept d'éditorialisation essaie de souligner comment la technologie façonne les contenus. Ainsi défini, on pourrait être tentés d'assimiler l'éditorialisation à la curation des contenus (digital curation) – qui désigne le processus d'organisation du contenu dans un environnemennt nuémérique déterminé. Mais il y a une distinction fondamentale entre les deux : le concept d'éditorailsiation implique une dimension culturelle qui n'est pas présente dans l'idée de curation des contenus. Cette dernière peut être définie comme la pratique de rassembler, d’organiser et d’afficher des contenus dans un environnement donné, ce qui met l'accent sur l'ensemble des compétences nécéssaires pour réaliser une bonne curation. En revanche, l'éditorialisation fait référence à la façon qu'ont les outils, les pratiques émergentes et les structures déterminées par les outils, d'engendrer une relation différente avec les contenus eux-mêmes. On pourrait dire que la curation est l'action d'un individu spécifique ou d'un groupe défini, tandis que l'éditorialisation met l'accent sur la façon dont cette action est structurée par les caractéristiques de l'environnement numérique. On doit souligner que ces cractéristiques ne sont pas seulement techniques mais aussi culturelles. Un exemple nous permettra de mieux saisir cette première définition. Imaginons que nous disposons d'un ensemble d'information sur une maladie particulière – disons, la grippe aviaire. Nous avons une descrition et un historique de la maladie, des données sur la pandémie, une liste des types de grippe, des statistiques sur les taux de mortalité, des conseils pour prévenir la contamination. Le gouvernement canadien pourrait décider de créer une plateforme pour donner ces informations aux citoyens. À cette fin, un groupe d'expert serait appelé à éditer ces contenus (content curration) : ils éditeront ces textes et les adapteront au piblic cible, ils choisiront des formes d'affichage des données (graphiques, tableaux, etc.), ils structureront la plateforme et travailleront sur son ergonomie, peut-être créeront-ils des profils Twitter et Facebook pour promouvoir et plubliciser la plateforme. Toutes ces actions rentrent dans les catégories de curration des contenus. Cette plateforme aura des usagers qui interragiront avec elle, commenteront les informations et relayeront peut-être ces contenus sur les réseaux sociaux. Probablement qu’ils réutiliseront une partie des informations sur d'autres plateformes et posteront des liens vers celle-ci sur d'autres sites. La plateforme sera indexée par des moteurs de reherche et des algorithmes la classeront dans des listes hiérarchiques. Elle occupera une position particulière sur le web : une position symbolique plus ou moins visible, plus ou moins importante et plus ou moins fiable. Ces aspects seront en évolution constante pendant les jours, les semaines, les mois et les années à venir. C'est ce processus que nous appelons éditorialisation. L'ensemble de tous ces éléments structure les contenus et leur donne leur signication. On pourrait donc dire que la curration des contenus est une partie de l'éditorialisation, et que l'éditorialisation est le processus dans son intégralité, qui prend en considération tous les aspects de la production, de la signification culturelle d'un contenu. Cela implique que l'éditorialisation faconne et structure les contenus, ne se limitant pas à un contexte fermé et bien défini (comme une revue) ou à un groupe prédéfini d'individu (comme les éditeurs). Elle implique une ouverture de l'espace (plusieurs plateformes) éditant (plusieurs contributions différentes, non limitées dans le temps). Cette ouverture est l'une des différences principales entre la curation et l'éditorialisation, elle est aussi ce qui différencie l'éditorialisation de l'édition traditionnelle. L'ouverture de l'éditorialisation par rapport à l'édition papier détermine une certaine perte de contrôle de l'écrivain comme de l'éditeur sur le contenu. Tous deux deviennent sulement une part du preccessus éditorial qui devient bien plus large. Considérons un deuxième exemple : la publication d'un article académique. L'équipe éditoriale d'une revue en ligne travaille à l'édition d'un article et le publie. Elle corrige le texte, le met en forme, le balise (en htmal ou en xml par exemple) elle édite les métadonnées et finalement elle le publie sur la plateforme de la revue. Ce travail n'a pas beaucoup de différences par rapport au processus d'édition sur papier. Mais dans un envirronement numérique, cela n'est que le début du processus. La vie de l'article, sa visibilit. Et sa circulation, dépendent d'une structure plus complexe, qui comprend des commentaires, des citations, des réutilisations, et des indexations. Par exemple, le fait que Google mette l'article au début d'une liste de résultats, est comparable au fait que l'article soit sur la couverture d'une revue papier, ou que la revue soit placée en vitrine d'une librairie. On pourrait objecter qu'il y a des aspects incontrôlés aussi pour l'édition papier – être dans la vitrine d'une librairie, par exemple, ne dépend pas de l'auteur ou de l'éditeur – mais le degré de contrôle a clairement changé dans l'espace numérique. La limite évidente de cette première définition est qu'elle considère l'environnement numérique comme un espace séparé. En ce sens, c'est une définition centrée sur le web, qui ne prend pas en considération l'hybridation entre l'espace numérique et l'espace non-numérique3. La deuxième définition est une extension de la première, basée sur l'idée que l'espace numérique détermine une superposition et finalement une fusion entre discours et réalité. J'expliquerai cette idée en détails ci-après – pour le moment, limitons-nous à son principe général : dans le monde numérique connecté, exister sgnifie être éditorialisé. Dans l'espace numérique, un objet doit être connecté et être mis en relation avec les autre sobjets pour exister. Par exemple, pour qu'un restaurant existe, il doit être sur TripAdvisor, ou sur GoogleMaps, ou sur une autre plateforme qui spécifie sa relation avec d'autres restaurants, un territoire, etc., tout en le rendant visible et compréhensible. Pour qu'une personne existe dans l'espace numérique, elle doit avoir un profil sur Facebook ou sur Twitter, ou sur Linkedn ou sur une autre plateforme qui puisse l'identifier et la rendre visible. L'éditorialisation devient donc une condition d'existence. Or, si cela est vrai, éditorialiser ne signifie pas seulement produire des contenus, mais aussi produire la réalité elle-même. Selon cette définition très large, l'éditorialisation est l'ensemble des formes collectives de négociation du réel. En d'autres termes, l'editorialisation est l'ensemble de nos pratiques sociales qui nous permette de comprendre, d'organiser et d'interpréter le monde. Le fait que l'espace dans lequel nous vivons est toujours l'espace numérique suggère que toutes ces pratiques ont lieu dans l'espce numérique, à savoir que toute pratique visant à comprendre, organiser ou interpréter le monde est un acte d'éditorialisation. Le problème de cette deuxième définition est qu'elle est trop générale et même trop vague. Il est difficile d'imaginer quelque chose qui ne soit pas éditorialisation dans ce sens si vaste. Cette définition risque donc de devenir inopérante en raison de son caractère trop général. Toutefois une analyse plus attentive révèle que ces deux premières définitions peuvent être synthétisées en une définition plus opérationnelle. On peut prendre en compte toutes les actions de production de contenus en ligne – sur le web ou sur d'autres formes d'environnement connectés (comme les applications mobiles) – en les comprenant comme des fonctions de structuration du réel. En ce sens, on peut définir l'éditorialisation comme un ensemble d'actions collectives et individuelles, qui ont lieu dans un environnement numérique en ligne, et qui ont pour objectif de structurer notre façon de comprendre, organiser, interpréter le monde. Ces actions sont façonnées par l'environnement numérique dans lequel elles se réalisent : l'éditorialisation, tel que souligné par la première définition, ne prend pas seulement en compte ce que les usagers font, mais aussi comment leurs actions sont déterminées et orientées par un environnement particulier. Il est important de souligner que si nous comprenons le mot “numérique” dans un sens culturel, l'espace numérique est notre espace principal, l'espace dans lequel nous vivons, et pas seulement l'espace du web ou des objets en ligne. Cela nous permet de faire la distinction entre différents environnements numériques – comme le web ou d'autres environnements ocnnectés – et l'espace numérique qui est le résultat de l'hybridation de ces environnements avec la totalité de notre monde. Ces considérations nous permettent de modifier notre définition et d'arriver à une formulation finale : L'Editorialisation désigne l'ensemble des dynamiques qui produisent et structurent l'espace numérique. Ces dynamiques sont les interactions des actions individuelles et collectives avec un environnement numérique particulier. Cette définition sous-entend trois aspects implicites de l'éditorialisation qu'il faut spécifier : un aspect technologique, un aspect culturel et un aspect pratique. Il est fondamental de comprendre que l'éditorialisation est lié à un environnement numérique particulier, ce qui implique que l'éditorialisation a un lien avec des technologies spécifique. Le terme éditorialisation a été créé en partie pour prendre en compte l'impact des technologies sur la production des contenus, et il est évident qu'un des aspects de l'éditorialisation est la présence de certains dispositifs, de certaines plateformes numériques, outils, réseaux et protocoles, qui à la fois contextualisent et structurent les contenus. Ce phénomène a été étudié par plusieurs chercheurs, et a été qualifié “affordance”4. La même analyse de l'impact des technologies sur les contenus peut être faite pour toutes les technologies de production et de circulation des contenus. L'environnement numérique est prescriptif car il détermine la forme des contenus qu'il héberge. La dimension technologique est donc fondamentale pour l'édition. Mais en même temps, on ne peut pas réduire l'éditorialisation à une question de technologie. En effet, il existe une relation complexe entre technologie et culture, selon laquelle la dimension culturelle est aussi centrale pour notre définition de l'éditorialisation. Évidemment, lorsque l'on tente de comprendre la structure de l'espace numérique, il est important d'éviter tout déteriminisme technologique1, à savoir l'idée selon lauqelle le développement techologique est un processus presque mécanique – une progression – qui détermine les changements culturels. Selon une position technodéterministe, la culture est déterminée par les développements de la technologie. En réalité, culture et technologie sont au contraire liées par une sorte de relation circulaire: la convergence de certaines idées culturelles et de certains découvertes technologiques implique un changement et ce changement est en retour façonné par des éléments à la fois culturels et technologiques. En d'autres termes : la culture influence la technologie et la technologie influence la culture. Il est impossible de séparer ces deux processus. L'éditoralisation décrit donc aussi la façon qu'ont nos traditions culturelles d'influencer notre manière de structurer les contenus[1].

1 See for example, Friedrich Kittler, Optical Media. Translated by Anthony Enns, 1 edition, Cambridge, UK ; Malden, MA, Polity, 2009. Or R. Schroeder, Rethinking Science, Technology, and Social Change. Stanford, Calif: Stanford University Press, 2007. 1 Roberto Gac has underlined the existence of these two definitions in a forthcoming paper: Éditorialisation et littérature. Du roman à l’intertexte. This paper will be soon published on Sens public. 2 Marcello Vitali-Rosati, «Digital Paratext. Editorialization and the very death of the author», inExamining Paratextual Theory and its Applications in Digital Culture, IGI Global, Nadine Desrochers and Daniel Apollon, 2014, p.110 127. 3 For a discussion on the relationship between digital and non digital space in academic publications, see Daniel Paul O’Donnell, A “Thought Piece” on Digital Space as Simulation and the Loss of the Original, [1], February 11, 2015. 4 Donald A. Norman, The Design of Everyday Things, New York, Basic Books, 2002.

Aspects problématiques

Concepts clés associés

  • Édition
  • Espace numérique

Liens

Références

  1. BACHIMONT, Bruno, «Nouvelles tendances applicatives : de l’indexation à l’éditorialisation», inL’indexation multimédia, Paris, Hermès, 2007, Bachimont FormatHerme%CC%80s.pdf